D'où vient le tissu madras ?

by Mikael Massol on Mar 15, 2022

Le madras est une étoffe à chaîne de soie et à trame de coton de couleur vive, formant des carreaux ou des rayures. Ce tissu vient de la ville de Chennai (4e plus grande ville en Inde aujourd'hui, une ville de pêcheur) dans le Sud de l'Inde anciennement appelé Madras, capitale de l'état du Tamil Nadu.

Il était fabriqué avec des fils de bananiers teints qui se cassaient très vite, et la matière issue du bananier laissait une odeur spéciale sur le tissu. Ces fils de bananiers étaient mélangés avec du coton, avant que celui-ci ne le remplace complètement, ainsi cette étoffe de coton et de soie fut fabriqué par la suite en Europe.

Ce tissu fut importé au 18e siècle sur les îles par les Anglais, bien avant les premiers afflux migratoires indiens pour la main-d'oeuvre aux Antilles, ce qui explique sa présence dans les coiffes et les tenues créoles portés par les noirs libres, puis porté par la bourgeoisie blanche du temps de Napoléon Bonaparte et Victor Hugo et enfin par les anciens esclaves affranchis en 1848.

Il fut donc porté par la population créole des petites Antilles, son tissu en coton léger et fin se froisse facilement, il est tissé en plusieurs couleurs qui forment des carreaux et des dessins servant surtout d'habits de tout les jours.

Il fallait faire une distinction entre le madras tissé avec des fils plats ayant des coloris vifs et variés (rouge, bleu foncé, et rose résultant du croisement de fils rouge et fils blancs) et le mouchoir tissé avec des fils retors en provenant de l'Angleterre.

Le madras comme le mouchoir des Indes présentent le long de la lisière, des petits trous faites par des pointes qui tendent le tissu sur le métier. La distance entre deux trous porte le nom "d'un coujou" aux Antilles, pendant longtemps la pièce de madras a été acheté par coujous.

Ainsi le mouchoir coûtait deux fois moins cher que le madras or ses couleurs étaient ternes et pâles il fallait donc trouver un moyen de le rendre plus attrayant en peignant toutes ses parties roses avec un mélange de gomme arabique et de jaune de Chrome appelé "calendage".

Il est probable que le tissu vienne à l'origine de Palicat à proximité de Madras, on parle de mouchoir de Paliacate, on lui aurait donné par la suite le nom de la plus grande ville de la région, qui se prénommait Présidence de Madras, mais le tissu fut aussi fabriqué dans la ville de Madras pour l'exportation.

Il est peu probable que le tissu apparaît dans les colonies dès le 17e siècle, car le mot apparait dans la langue française à la fin du 18e siècle, à moins qu'il ne s'agisse d'exportation de palicate nommé par la suite madras.

Les Anglais ayant le monopole du commerce du madras en Inde, enverront des cotons pour les tisser à la manière du madras, les Français vont teindre et tisser le coton à Rouen considéré comme la capitale française du madras.

Peu à peu, le madras s'est démocratisé en touchant les femmes blanches, puis les femmes noires de la Martinique, Guadeloupe, Guyane, des colonies anglaises comme Trinidad et tobago, la Jamaïque et l'île Maurice, les couleurs vives rouges, jaunes, vertes se marient parfaitement aux peaux noires et ont une symbolique. La mosaïque des couleurs venant de ses mélanges traduit l'histoire de la composition ethnique des sociétés créoles qui ont connu un large métissage de leur population.

Le Madras est très ancré dans la culture antillaise et se porte en costume lors des jours de fête, lors des grandes occasions (bals, mariages, communions, baptêmes,) il est souvent orné de dentelles blanches.

La coiffe en madras était un symbole de dignité en Inde, qui fut adopté au Antilles et détourné en code romantique. Elle est portée par les femmes en habit traditionnel et lorsqu'elles portent une coiffe à :

- une pointe veut dire que son cœur est à prendre.

- deux pointes signifient qu'elle est prise mais que les hommes peuvent essayer de la courtiser.

- trois pointes veulent dire que la femme est mariée et fermer à une aventure.

- quatre pointes signifient qu'elle est mariée, mais ouverte à un nouvel amant.

Le madras, aujourd'hui, est décliné sous diverses formes d'accessoires textiles, et pour la décoration d'intérieur représentant une part du patrimoine antillais et créole.

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